Guillaume Belbis, docteur vétérinaire, Dipl. ECBHM
Le bien-être des bovins passe aussi… par leurs pieds ! Trop souvent négligé, le parage des onglons est pourtant un acte clé pour prévenir les boiteries, améliorer le confort des animaux et optimiser leur production, que l’on parle de bovins laitiers ou de bovins allaitants, voire pour les jeunes bovins à l’engraissement. Chez le bovin adulte, près de 95 % des causes de boiterie sont d’origine podale !
Avant d'aller plus loin, il est important de rappeler que les bovins possèdent deux onglons par doigt ( voir les figures 1 et 2 ci-dessus), ce qui rend l'équilibre entre les deux particulièrement important. Un déséquilibre ou une usure irrégulière peut entraîner douleurs, boiteries, lésions voire infections.
Le parage est une intervention mécanique qui consiste à tailler l’onglon (la corne du pied) pour lui redonner une forme et un appui physiologique.
On distingue le parage fonctionnel ou préventif, réalisé chez un animal non boiteux, et le parage curatif qui est réalisé chez l’animal atteint d’une affection podale à l’origine d’une boiterie.
Dans le premier cas de figure, l’objectif est de corriger les excès de croissance, d’éliminer les déformations et de rééquilibrer les charges sur les membres. Dans le second, on complète par une prise en charge spécifique de la ou des lésions présentent.
La croissance de la corne (et par conséquent de l’onglon) n’est pas un phénomène homogène. Plusieurs événements coexistent.
1. Une croissance inégale de la corne
La croissance de la corne n'est pas homogène sur l'ensemble du pied. Elle est plus marquée sur la partie antérieure abaxiale (externe) du pied.
2. L'impact de la charge
La croissance est plus importante sur les parties du pied où la charge est plus élevée, notamment les onglons externes des membres postérieurs (voir figure ci-dessous).
Crédit photo : @ Guillaume Beblis
3. L'usure des onglons
Les onglons s'usent normalement sur des sols durs, compensant la production continue de corne. Cependant, des sols trop durs peuvent entraîner une usure excessive, tandis qu'une insuffisance d'usure peut conduire à une croissance excessive de l'onglon.
4. La qualité de la corne
Lorsqu'une atteinte est portée à l'épiderme ou au pododerme, une corne de qualité médiocre est produite.
5. Les conditions d'élevage
Les conditions d'élevage favorisent souvent une usure insuffisante de la corne, ce qui peut entraîner des modifications de la conformation du pied. La partie antérieure et abaxiale, qui pousse plus vite, sera souvent moins usée car très dure ; la corne axiale de la sole, elle, pousse moins vite et s’use plus rapidement car celle-ci est moins dure.
6. Les conséquences internes
À l’intérieur de la boite cornée, cela conduit à un « basculement » de la 3ème phalange qui penche vers l’arrière et la région axiale : la force exercée par la partie caudale de la 3ème phalange (et notamment sa protubérance axiale et solaire) est répartie sur une zone plus faible, ce qui augmente la pression exercée sur le pododerme et va conduire au développement d’une lésion, « l’ulcère typique de la sole » qui se retrouve en zone axiale, à la jonction entre la corne de la sole et celle du talon (voir la figure ci-dessous).
Crédit photo : @ Guillaume Beblis
Le parage peut être réalisé « à la main » (avec couteaux et pinces) ou à la disqueuse, par un professionnel formé (vétérinaire ou pareur).
Les grandes étapes sont :
observation de la locomotion et inspection du pied ;
parage fonctionnel : correction des longueurs et angles pour équilibrer les onglons ;
détection des lésions : vérification de la sole, de la ligne blanche, du talon ;
soins éventuels : nettoyage, pansements, pose de talonnettes si un onglon est lésé ;
désinfection des outils entre chaque animal pour éviter les contaminations.
Il est primordial de travailler dans de bonnes conditions d’immobilisation (cage de parage ou autre méthode de contention) pour garantir la sécurité de l’animal et du pareur.
La fréquence du parage dépend des besoins spécifiques de chaque animal.
Parlons tout d’abord du parage curatif : tout animal boiteux doit obligatoirement être paré pour explorer les lésions potentielles et les traiter, et ce le plus précocement possible afin d’améliorer la guérison tout en limitant la douleur de l’animal.
Concernant le parage fonctionnel (ou préventif), celui-ci doit être réalisé a minima une fois par an. Néanmoins cette fréquence peut s’avérer insuffisante pour permettre une prévention optimale. Il parait plus optimal en élevage laitier de réaliser ce parage préventif deux fois par an, mais surtout à des moments clés du cycle de production :
Un premier parage peut être réalisé deux mois après le vêlage, afin de traiter les affections podales survenues à la suite des différents événements survenus après le vêlage (déficit énergétique, stress du vêlage, changement alimentaire, etc.) ;
Un second parage sera réalisé autour du tarissement de la vache, afin de permettre de corriger les anomalies survenues pendant la lactation et permettre à la vache d’attaquer cette période de repos dans les meilleures conditions.
L’auteur déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt qui pourrait influencer ou biaiser de manière inappropriée le contenu de l'article.
Mise en ligne le : 14 octobre 2025
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