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Hypocorticisme canin (maladie d’Addison) : reconnaître, confirmer, traiter

Antoine Duclos, docteur vétérinaire, DipECVIM-CA (Internal Medicine)

Rare mais potentiellement grave, la maladie d’Addison chez le chien est une affection endocrinienne à ne pas négliger. Les signes cliniques sont souvent vagues, évoluant sur plusieurs semaines, et peuvent retarder le diagnostic.

Pourtant, en situation aiguë, une crise Addisonienne peut engager le pronostic vital. Reconnaître les indices biologiques clés, confirmer le diagnostic et instaurer une prise en charge adaptée peuvent permettre de sauver l’animal et d’offrir, avec un traitement substitutif bien conduit, une qualité de vie durable.

Qu’est-ce que la maladie d’Addison ?

L’hypocorticisme ou maladie d’Addison correspond à une insuffisance en hormones glucocorticoïdes (cortisol), le plus souvent couplée à une insuffisance en hormones minéralocorticoïdes (aldostérone).

Les signes cliniques d’insuffisance en cortisol incluent des signes peu spécifiques qui peuvent évoluer sur plusieurs mois (abattement, dysorexie), des signes digestifs (diarrhée, vomissement, perte de poids) et des signes secondaires à une hypoglycémie (hypovigilance, désorientation, crise convulsive).

Les signes cliniques d’insuffisance en aldostérone sont plutôt aigus et incluent polyuro-polydipsie, hypotension, et les signes cliniques secondaires à une azotémie et à une hyperkaliémie (abattement marqué, bradycardie pouvant aller jusqu’à l’arrêt cardiaque).

 

Quelles en sont les causes ?

La maladie d’Addison résulte le plus fréquemment d’une destruction bilatérale de la zone corticale des glandes surrénales.

Comme chez l’humain, une origine dysimmunitaire est fortement suspectée, comme l’illustre la prédisposition des chiens femelles et des jeunes adultes pour la maladie.

Une origine génétique est également probable compte tenu de la prédisposition de certaines races (caniche, West Highland White Terrier, dogue allemand, etc.).

Plus rarement, des causes tumorales, infectieuses ou parasitaires, ou encore vasculaires peuvent également affecter le cortex surrénal et causer un hypocorticisme.

Enfin, une atteinte de la glande pituitaire peut également causer une insuffisance en hormone adrénocorticotropique (ACTH), causant un hypocorticisme secondaire (caractérisé par une insuffisance en cortisol uniquement).

 

Points clés

  1. Il faut penser à une maladie d'Addison devant des signes chroniques vagues (abattement, troubles digestifs) associés à des désordres électrolytiques.
  2. L’absence de formule de stress est un signe d’appel biologique important.
  3. Le test de stimulation à l’ACTH reste le gold standard diagnostique.
  4. La crise Addisonienne est une urgence vitale nécessitant fluidothérapie et corticothérapie rapide.
  5. Le traitement substitutif à vie (DOCP/fludrocortisone + prednisolone) assure une bonne qualité de vie si le suivi est adapté.

 

Comment diagnostiquer une maladie d’Addison ?

Le diagnostic doit être suspecté face à des éléments cliniques et paracliniques évocateurs.
Au bilan biologique, l’insuffisance en cortisol se caractérise par une absence de formule de stress (avec lymphocytose et éosinophilie relatives, sans neutrophilie ni monocytose), et par une hypocholestérolémie, hypoalbuminémie et hypoglycémie.

L’insuffisance en aldostérone se caractérise par une hyponatrémie, une hyperkaliémie et une azotémie pré-rénale.

Une hypercalcémie totale ou ionisée dont le mécanisme pathophysiologique précis reste peu connu peut également faire partie du tableau biologique.

Un rapport Na/K inférieur à 27 est évocateur de maladie d’Addison sans avoir une spécificité parfaite (des faux positifs restent possibles en cas de maladies digestives ou rénales sévères notamment). Similairement, certains chiens peuvent être présentés sans désordre électrolytique ; un rapport Na/K supérieur à 27 ne permet pas d’écarter formellement une maladie d’Addison.

La mesure de la cortisolémie basale permet en théorie d’exclure la maladie d’Addison (si la valeur est supérieure à 55nmol/L).

Cependant, ce test ne permet pas de confirmer une maladie d’Addison ; une stimulation à l’ACTH (mesure de la cortisolémie avant et après injection d’ACTH) est requise pour démontrer une insuffisance corticosurrénale.

La mesure de l’aldostéronémie avant et après injection d’ACTH est également possible mais est seulement réalisée pour des indications précises (maladie d’Addison sans désordres électrolytiques).

Récemment, l’évaluation du cortisol urinaire a été utilisée pour déterminer des tests de dépistage prometteurs. Cependant, des études supplémentaires sont nécessaires avant de pouvoir formellement recommander la réalisation de ces tests.

 

Comment traiter une maladie d’Addison ?

Le traitement repose sur une supplémentation en hormones minéralocorticoïdes et glucocorticoïdes une fois le diagnostic obtenu.

En cas de présentation aiguë engageant le pronostic vital (crise Addisonienne), une stabilisation en urgence est requise (fluidothérapie agressive, prise en charge de l’hyperkaliémie, de l’hypoglycémie le cas échéant, traitements de soutien de la fonction digestive) associée à une corticothérapie à valence gluco- et minéralo-corticoïde (hydrocortisone, dexaméthasone dans une moindre mesure).

Une fois l’animal stabilisé, le traitement repose sur une supplémentation à vie en hormones minéralocorticoïdes (pivalate de déoxycorticostérone (DOCP) ou fludrocortisone) et glucocorticoïdes (prednisolone) à dose physiologique.

En cas de situation stressante anticipée pour l’animal (voyage, visite chez le vétérinaire), il est recommandé d’augmenter la dose de glucocorticoïdes pendant quelques jours. En effet, en situation de stress, un chien normal compense en sécrétant davantage de cortisol, ce qui lui permet de maintenir sa glycémie malgré l’augmentation des besoins énergétiques et sa pression artérielle. Chez un chien atteint de la maladie d’Addison, cette adaptation physiologique est impossible, entraînant un risque d’hypoglycémie et de collapsus.

La supplémentation en hormones minéralocorticoïdes est réalisée par injection mensuelle. La dose et la fréquence d’administration requises pouvant varier individuellement, une période d’adaptation est nécessaire en début de traitement. Une évaluation de la natrémie et de la kaliémie 10 jours après injection de DOCP est, par exemple, nécessaire après la première injection. De la même manière, une évaluation de la kaliémie et de la natrémie le jour de l’injection peut être réalisée pour déterminer l’intervalle d’administration adéquat.

Une fois le régime d’administration adéquat obtenu, l’espérance de vie des chiens atteints de la maladie d’Addison est la même que celle d’un chien sain du même âge.

Déclaration de conflit d'intérêt

L’auteur déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt qui pourrait influencer ou biaiser de manière inappropriée le contenu de l'article.

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Mise en ligne le : 23 septembre 2025

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