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Avantage en nature : loger son salarié, comment procéder ?

Crédit photo @Shisu_ka - stock.adobe.com

Moins cher que le prix du marché, proche de la clinique pour les gardes et astreintes, solution simple et rapide pour l’installation d’un salarié qui change de région pour vous rejoindre : pouvoir loger un salarié constitue un atout pour l’attractivité de votre entreprise vétérinaire sur le marché du travail, atout dont peu se priveront au regard du contexte de recrutement actuel.


Votre clinique, vous-même, ou encore un tiers est propriétaire du bien idéal pour loger votre salarié. Loyer, contrat, règlement des charges, on vous explique les bons choix à faire pour loger vos salariés.

Rappel utile sur le caractère décent d'un logement

Le but étant d’attirer un salarié dans votre entreprise, on se doute que vous avez déjà exclu de le loger dans une « cage à poule » et que vous comptez lui trouver un logement correct. Cependant, pour être décent [1] d’un point de vue juridique, le logement de votre salarié devra respecter quelques critères [2] :

 

  • Avoir une surface minimale suffisante : c’est-à-dire soit avoir une surface habitable au moins égale à 9 m² avec une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit avoir un volume habitable total au moins égal à 20 m³.

  • Même si le cliché du véto qui aime les animaux à la vie dure, nuisibles et autres parasites ne devront bien sûr pas y avoir leur place. Plus largement, le logement ne doit présenter aucun risque pour la sécurité ou la santé de votre salarié (gaz et électricité notamment devront être aux normes).

  • Avoir une performance énergétique minimale. En pratique, pour les nouveaux contrats de location conclus depuis le 1er janvier 2023, le logement est décent si sa consommation d'énergie est inférieure à 450 kWh d'énergie finale par mètre carré de surface habitable et par an.

  • Contenir des équipements de base (chauffage, sanitaires, cuisine, eau...).

 

De même, vous n’échapperez pas aux traditionnels diagnostics techniques aux acronymes barbares dont l’administration française a le secret (DPE, ERP, CREP…). Votre diagnostiqueur saura vous indiquer lesquels sont nécessaires et cela vous aidera d’ailleurs à vous assurer que les critères évoqués ci-dessus sont correctement remplis. C’est au propriétaire de les faire réaliser et de les fournir au locataire. Mais attention : dans le cas d’un montage (que nous évoquerons plus en détail au cours de ses lignes) où c’est une entreprise qui loue un logement à un propriétaire tiers pour y installer son salarié, les diagnostics devront être transmis à ce dernier.

Le " logement de fonction " : que des avantages ou presque... 

C’est bien parce qu’il est un salarié de l’entreprise, et uniquement pour cette raison, que celle-ci souhaite mettre un logement à sa disposition. Il est donc logique, et important d’un point de vue contractuel, que ce logement ne soit que l’accessoire de la relation de travail.

L’outil juridique idéal pour remplir cette fonction est ce que l’on appelle le « logement de fonction » qui désigne, de manière très générale, l’habitation mise à la disposition du salarié par son employeur dans le cadre de ses fonctions/missions. Même si, dans l’imaginaire collectif, il est plus souvent associé aux fonctionnaires du service public (militaire, directeur d’école, par exemple) ou aux cadres dirigeants des grandes entreprises, il peut s’adresser en réalité à n’importe quel salarié et présente, nous le verrons plus loin, d’immenses avantages par rapport au classique « bail d’habitation » dit « bail loi de 89 » [3] qui reste très rigide et réglementé.

En effet, le « bail loi de 89 » est encadré par des règles contraignantes difficilement compatibles avec le déroulement normal de la relation de travail. Par exemple, sa durée est imposée : 3 ans dans le cas d’un logement vide et 1 an dans celui d’un logement meublé. De plus, les motifs permettant la récupération du logement par le propriétaire sont particulièrement limités.

Avec « un logement de fonction », la restitution du logement à son propriétaire pourra intervenir automatiquement à la fin de la relation de travail quel qu’en soit le moment ou la cause (démission, licenciement, départ en retraite…). Elle pourra aussi intervenir à une date fixée à l’avance ou encore à la date à laquelle le salarié trouverait un logement par ses propres moyens au cours de son contrat de travail.

Seul bémol, le salarié qui possèderait déjà une résidence principale qu’il n’abandonnerait pas au profit de son logement de fonction, pourra voir ce dernier considéré comme une résidence secondaire. Ce qui pourrait ne pas constituer la meilleure option pour lui du point de vue fiscal. En effet, les logements de fonction bénéficient de la suppression totale de la taxe d'habitation en 2023 mais seulement à condition d'être occupés à titre de résidence principale par l'employé. Si le logement de fonction constitue la résidence secondaire du salarié, il faudra alors payer une taxe d’habitation.

Qui paye quoi ? On a le choix...

Vous souhaitez loger votre salarié gratuitement, ou pour un loyer réduit, ou encore au prix du marché ? Bonne nouvelle, vous avez le choix.

Le loyer peut être pris en charge intégralement ou en partie par l’employeur. Il sera alors considéré comme un avantage en nature logement avec toutes les conséquences que cette notion implique (soumission à cotisations sociales, apparition sur le bulletin de salaire, réévaluation annuelle) et que votre comptable ou gestionnaire de paie devra prendre en considération.

L’évaluation du montant de l’avantage en nature peut se faire de 2 façons : soit en prenant la valeur locative du logement sur le marché, soit de manière forfaitaire via un barème URSSAF fondé sur le nombre de pièces du logement et la rémunération brute du salarié. Cette dernière option peut constituer un avantage fiscal non négligeable dans les villes où les loyers sont très hauts. N’hésitez pas à consulter les barèmes de l’URSAFF pour la détermination de la meilleure approche [4].

Prenons un exemple : pour un logement qui se loue 600 euros par mois sur le marché locatif et qui est évalué à 400 euros par mois en utilisant le barème URSSAF, il vaut mieux utiliser le barème car pour le même avantage en nature, l'entreprise ne paiera des charges patronales que sur 400 euros et non sur 600 euros.

Le loyer pourra aussi être payé par le salarié de manière classique. Notons que, même si cela va à l’encontre de l’objectif d’attractivité du logement de fonction, il est possible d’exiger du salarié le règlement d’un loyer supérieur au prix du marché et même un loyer supérieur au plafond instauré dans certaines zones dites « tendues » dans lesquelles un encadrement des loyers a été instaurée en application de la loi Alur [5].

De même, les charges locatives (entretien des parties communes, eau, électricité...) et la fiscalité (taxe d'enlèvement des ordures ménagères, taxe d’habitation le cas échéant) pourront être prises en charge par l’employeur en totalité ou en partie ou encore laissées à la charge du salarié avec les mêmes conséquences à prendre en compte que pour le loyer.

Quel montage juridique côté salarié : le contrat de travail

Le logement de fonction reste un accessoire de la relation de travail et les conditions de son octroi seront, en toute logique, stipulées dans le contrat de travail (ou en annexe de celui-ci). Un document signé à part et souvent nommé à tort « bail » ou « bail logement de fonction » est parfois rédigé. Nous le déconseillons fortement afin d’éviter toute ambiguïté qui pourrait s’insinuer dans la tête du salarié ou dans celle du juge en cas de litige sur le caractère de fonction ou non du logement.

La contractualisation idéale consiste à inclure, dans le contrat de travail, une clause claire faisant référence à l’octroi d’un logement de fonction (en précisant l’adresse et le nombre de pièces de celui-ci) et renvoyant directement à une annexe intitulée par exemple « conditions d’octroi du logement de fonction » qui se chargera quant à elle de préciser les nombreuses autres conditions : loyer, charges (ou évaluation du montant de l’avantage en nature correspondant), montant du dépôt de garantie, diagnostics immobiliers, état des lieux, possibilité de départ du logement au cours du contrat de travail, obligation de souscrire une assurance habitation…

À ce dernier titre, un point important doit être soulevé : le salarié occupant un logement de fonction n’a pas l’obligation de souscrire une assurance habitation mais il reste tout de même responsable des éventuels sinistres qu’il pourrait causer (incendie, dégât des eaux…). La souscription d’une telle assurance nous paraît donc indispensable et nous conseillons vivement à l’employeur d’en exiger la souscription dans le contrat de travail ou dans l’annexe relative au logement de fonction.

Quel montage juridique côté entreprise : le bail " logement de fonction "

Dans le cas le plus simple, même s’il n’est pas le plus fréquent, l’employeur est également propriétaire du logement qu’il compte mettre à disposition de son salarié. Le contrat de travail et son annexe suffisent alors à lier les deux parties.

En revanche, dans la plupart des situations, le logement n’appartient pas directement à l’entreprise/employeur. Il peut appartenir à l’un des associés, à la SCI propriétaire des murs de la clinique ou encore à un tiers. Dans ce montage, l’équation comprend alors une 3ème partie : le propriétaire du logement. Ce dernier devra alors tout simplement donner en location son logement à l’entreprise/employeur afin qu’elle puisse à son tour le mettre à la disposition de son salarié. Le contrat liant alors le propriétaire/bailleur à l’entreprise/employeur est un bail particulier appelé dans la pratique un « bail logement de fonction » et il est lui aussi bien moins contraignant que le bail loi de 89.

Le « bail logement de fonction » est une solution très souple qui présente de nombreux avantages pour le bailleur comme pour l’employeur qui pourront tous deux l’adapter au plus près de leurs besoins.

  • Le choix de la durée est libre (par exemple 6 mois renouvelable automatiquement pour la même période). De même, la durée du préavis pour mettre fin au contrat de bail est libre. Si la mission du salarié est circonscrite dans le temps, il est ainsi possible d’opter pour un bail dont la date de fin sera fixée à l’avance (aucun préavis ne sera donc nécessaire). On peut aussi prévoir que le contrat de bail se termine si le salarié quitte l’entreprise ou au contraire qu’il se maintient pour que différents salariés puissent se succéder dans le logement.

  • Le loyer sera établi librement au prix du marché et ne sera pas soumis à l’encadrement de la loi Alur. Le choix de l’indice permettant l’indexation annuelle du loyer reste également libre même si le très classique IRL (Indice de Référence des Loyers) paraît le plus adapté.

  • Les charges pourront être réglées de manière forfaitaire ou au réel avec le plus souvent dans ce cas la mise en place du règlement d’une provision mensuelle qui sera régularisée chaque année.

  • Le montant du dépôt de garantie est lui aussi libre (par exemple 1, 3 ou encore 6 mois de loyer).


En conclusion, loger son salarié nécessite de faire concorder l’usage d’un logement et une relation de travail. L’outil juridique le plus efficace pour ce faire reste l’octroi d’un logement de fonction par le biais du contrat de travail. L’employeur non-propriétaire pourra toujours prendre en location un logement et y loger son salarié. La liberté contractuelle du bail logement de fonction lui permettra d’adapter au mieux ce dernier à son activité et au marché immobilier local. Quelle que soit la situation, le bail loi de 89 qui s’avèrera trop rigide et règlementé sera à éviter.

 

 

Gautier Slove,

Juriste spécialisé en immobilier d'exploitation

 

Ressources documentaires et bibliographiques :

[1] Au sens du Décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002. Disponible en ligne sur :  Légifrance. [Consulté le 3 mai 2023] ;

[2] En cas de doute un très bon article librement accessible sur le site du bien connu Particulier à Particulier devrait pouvoir répondre à toutes vos questions : Qu'est-ce qu'un logement décent. [Consulté le 3 mai 2023] ;

[3] En référence à la loi du 06 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. Disponible sur : Légifrance. [Consulté le 3 mai 2023] ;

[4] Les barèmes sont disponibles sur le site de l'URSAFF. [Consulté le 3 mai 2023] ;

[5] Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 dite « Loi Alur ». Disponible sur : Légifrance. [Consulté le 3 mai 2023].

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