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Être auxiliaire vétérinaire quand on est un homme, et alors ?

Crédit photo @ New Africa - stock.adobe.com
Corentin est ASV depuis quelques mois maintenant. Il fait partie de cette petite minorité d’homme qui travaille en tant qu’auxiliaire vétérinaire. En effet, et depuis l’apparition de cette profession en France, le rôle de l’ASV est très majoritairement tenu par des femmes (d’après une thèse d’exercice vétérinaire sur le sujet datant de 2021, 96 % des ASV en France seraient des femmes [1]). Et si progressivement nous voyons apparaitre de plus en plus d’hommes sur les bancs des centres de formation au métier d’ASV, il faudra probablement encore un peu de patience avant d’en arriver à ne plus être tenté de dire spontanément : « Les ASV sont géniales ! » Et devant cette réalité, nous avons eu envie de demander à Corentin de partager avec nous son ressenti et son vécu d’ASV au masculin dans une profession encore très largement féminisée.

Du choix de la profession à la formation

Si Corentin a su très tôt qu’il travaillerait avec les animaux, au départ il voulait devenir vétérinaire. Et s’il n’a pas eu la possibilité d’aller au bout de ce projet, il estime aujourd’hui que c’est mieux comme ça ! Il pense, en effet, que la charge de travail et les responsabilités qui pèsent sur les épaules des vétos n’étaient pas faits pour lui ! Alors, c’est sans aucun regret, qu’il s’est lancé il y quelques années maintenant, dans une formation pour devenir ASV !

Côtoyant depuis longtemps déjà, le monde de la santé animale et celui de l’équitation, qu’il a commencé à l’âge de 4 ans, Corentin était parfaitement conscient de la proportion de « filles » qu’il allait retrouver dans sa classe lors de sa rentrée pour son cycle de 2 ans de formation. C’est même le nombre inattendu de « garçons » qui a plutôt été une surprise (5 sur les 25 élèves, soit 20 % de sa classe, bien plus que les 4% actuels de la profession). Une surprise pour lui mais aussi pour ses formatrices peu habituées à voir des hommes auxiliaires vétérinaires dans les structures où elles exercent. Visiblement étonnées mais plutôt contentes de voir ces nouveaux profils arriver dans la profession.

La vie dans l’école a été rythmée, comme dans de nombreuses écoles, par les « chamailleries » et autres « jalousies » d’usage. Alors que la crise sanitaire n’a pas favorisé les contacts, ces « petits conflits » étaient bien plus liés aux différences de générations (ndlr certains élèves étaient en reconversion professionnelle après un parcours plus ou moins long dans le monde du travail) et aux différences de profils, qu’à un potentiel impact de la proportion de genres des étudiants.

Durant ces 2 années, Corentin, comme tous les autres élèves, a été amené à effectuer plusieurs stages. Ces stages sont l’occasion des premiers pas dans le milieu vétérinaire et au sein des équipes d’ASV. Corentin raconte que lors de ses recherches de stage le fait qu’il soit un homme n’était pas tout à fait neutre. C’était objectivement plutôt un atout. Certains vétérinaires avouant plutôt rechercher des ASV masculins pour compléter leur équipe. Sans savoir vraiment pour quelle raison, cela a en tous cas permis à Corentin d’obtenir les stages qu’il espérait. Stages durant lesquels il s’est parfaitement intégré dans les équipes d’ASV 100% féminine qu’il rejoignait. Il décrit avoir toujours été accueilli à bras ouverts par des collègues toujours prêtes à lui laisser porter le chien de 60 Kg ! Blague à part, il décrit comment son arrivée en tant qu’homme dans ce milieu classiquement « réservé » aux femmes a toujours été vu comme quelque chose de positif apportant une certaine diversité dans les équipes.

La prise de poste et l'expérience

Comme bon nombre de ses camarades de promo, Corentin a trouvé du travail facilement après sa formation. Un stage qui se transforme en CDI et le voici officiellement ASV dans une structure équine. Selon lui, son statut d’homme n’a eu que peu d’impact sur cette proposition d’embauche, celle-ci étant plutôt liée à sa motivation à travailler dans ce milieu.

Au fil de nos échanges, Corentin nous rapportera tout de même que certains vétérinaires se méfieraient à l’idée d’embaucher un homme au sein de leur équipe exclusivement féminine d’ASV. Peur d’histoires de cœur qui n’auraient pas leur place au travail ? Peur de confusion de genre auprès des clients ? Ou plus simplement, problème logistique de vestiaires et d’accès aux toilettes ? Ce ne sont que des suppositions, aucun vétérinaire n’ayant clairement exposé ses raisons, mais pour autant, il y aurait bien des cas de discrimination à l’embauche liée au sexe du candidat auxiliaire vétérinaire.

À en croire l’expérience de Corentin que ce soit vu plutôt comme un atout ou au contraire plutôt comme un défaut, le fait d’être un homme quand on postule pour un job d’ASV ne semble définitivement pas être totalement neutre.

Quand on demande alors à Corentin quels sont pour lui les avantages et les inconvénients possiblement liés à la présence d’un ASV homme dans l’équipe, il nous parle force physique bien qu’il ne pense pas que cela fasse réellement une différence mais il ne voit objectivement pas, à ce stade de sa carrière du moins, de réelles différences. Et alors que je l’interroge sur le côté potentiellement rassurant pour une équipe d’ASV d’avoir un homme notamment lors de gestion de conflits avec les clients, il admet ne s’être jamais posé la question et ajoute qu’aucune de ses collègues féminines ne lui a fait la remarque non plus. Cette discussion nous amène à parler des clients justement. Comment perçoivent-ils Corentin ? Il sourit à cette question. Les clients ont du mal à imaginer tout de suite qu’il est auxiliaire vétérinaire. Corentin raconte :

« Souvent les clients me prennent pour tout, sauf pour un auxiliaire vétérinaire ! Que ce soit stagiaire de 3ème, stagiaire vétérinaire ou même vétérinaire directement… Ils me posent très souvent la question : « Souhaiteriez-vous devenir vétérinaire ? ». C’est assez frustrant, car c’est comme si mon métier n’était pas nécessaire alors que c’est celui que j’ai choisi et que je suis heureux de faire.

Lorsque les clients apprennent que je ne suis finalement « qu'auxiliaire vétérinaire », la réaction est souvent la même : « Un garçon auxiliaire vétérinaire, c’est plutôt rare ! ». Cela me fait légèrement sourire mais c’est vrai que sur le long terme c’est assez usant. Je ne comprends pas pourquoi ce métier reste autant « sexualisé » alors que le monde est clairement en train de changer. »

Et d’ailleurs, cette féminisation systématique du métier d’ASV est partout. Combien de vétérinaires s’adressent à leur équipe d’ASV en interpelant « les filles » ou autre terme à connotation féminine, parfois même alors qu’un homme est dans l’équipe. À ce sujet Corentin explique :

« Cela se produisait déjà, à l’équitation, quand j’étais enfant. À ces occasions, j'ai souvent ressenti un peu de mise à l’écart. Maintenant, je préfère en rire ! Je n’y fais plus tellement attention. Et puis généralement les clients ou autres personnes s’excusent de leur maladresse. Je ne le prends pas personnellement, d’autant plus que la langue française n’est pas très inclusive vis-à-vis des femmes. Je ressens donc à ce moment-là, ce qu’elles peuvent ressentir dans diverses occasions. »


Finalement, que l’on soit une femme ou un homme, ce qui compte surtout quand on envisage de devenir ASV, c’est probablement de savoir à quoi correspond ce métier. Et même si dans l’imaginaire collectif, les raccourcis liés au genre sont nombreux : les vétérinaires sont des hommes (ce qui soit dit en passant n’est plus vrai depuis longtemps !) et les ASV sont des femmes ; notre société évolue, à son rythme, mais elle évolue. L’écriture inclusive est un bon exemple de cette évolution et des questions qui en découlent. Alors que vous soyez " fille " ou " garçon ", nous vous souhaitons surtout de vous épanouir dans ce métier qui est le vôtre.

 

Propos recueillis par Manuelle Hoornaert
Vétérinaire & Rédactrice en chef

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