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Année sabbatique : pourquoi les (jeunes) vétos font-ils une pause ?

Crédit photo @StockSnap - pixabay.com

Dans nos vies, que l’on soit véto ou non, tout va souvent très vite : alors pourquoi ne pas envisager de prendre un peu de recul en faisant une pause ? Quoi de mieux pour cela qu’une année sabbatique ? Quelques mois, dans un cadre nouveau, pour voyager, découvrir le monde ou tout simplement faire autre chose. Je vous en parle, d’abord parce que ma propre année " off " est en préparation mais aussi parce que, dans mon entourage de jeune véto, les exemples ne manquent pas.


Pour mon compagnon et moi, ce sera un tour de l’Atlantique en voilier : Canaries, Cap Vert, Antilles, Açores… Raphaël et Charlène, tous les 2 vétos, sont eux, partis avec leurs chiens à bord de " Gimli ", un van aménagé, pour faire un tour d’Europe. Une semaine après leur mariage, Basile et Laura, eux aussi vétos, ont fait un " tour du Monde de miel " entre le Kirghizistan, la Polynésie et l’Argentine. Amandine et Tom voyagent autour du monde pour faire du " wwoofing ". Émilie s’est donnée un an pour atteindre Hawaï depuis l’Asie. L’objectif ici n’est pas de vous raconter leurs voyages parce que je suis sûre qu’ils le feront mieux que moi (et que nous ne sommes pas une agence de voyage !). L’idée est plutôt de comprendre pourquoi notre génération ressent particulièrement le besoin de faire cette pause à la lumière de notre relation au travail.

Pourquoi partir ?

En réalité, la question est plutôt : " Et pourquoi pas ? ". Le marché de l’emploi permet aujourd’hui aux vétérinaires que nous sommes d’être quasi certains de retrouver du travail au moment voulu. Sur le plan professionnel, dans mon cas, si l’association est un projet qui me fait envie, à ce stade, je suis salariée et mon conjoint aussi. Nous sommes jeunes, nous n’avons pas d’enfant. Et surtout, nous en avons envie. Ce point de vue qui est le nôtre est partagé par tous ceux que j’ai eu la chance d’interroger. Contrairement à ce que certains pourraient penser, ce n’est pas la fuite d’un quotidien morose ou d’un job contraignant : c’est surtout un désir de découvrir le monde et de prendre, peut-être égoïstement, du temps pour soi.

Nos projets ne se sont pas décidés en un jour. Chez les uns comme chez les autres, plusieurs années ont été nécessaires pour prévoir le voyage. Le projet commence souvent à germer pendant les études, parfois même avant le bac pour les plus audacieux, pour mûrir lors des dernières années d’études ou des premières années de boulot. Basile et Laura parlaient de faire le tour du monde depuis leur rencontre en 2016, Émilie prévoyait ce voyage depuis ses 17 ans et Amandine en rêvait depuis son enfance (rêve en 3e position sur sa liste après : avoir un cheval et devenir vétérinaire !).

Tous les départs, ou presque, ont simplement été conditionnés par la volonté d’avoir un diplôme en poche, quelques années d’exercice derrière soi et quelques économies !

Un voyage bien percu ?

L’annonce à mes patrons était un moment que je redoutais. Connaissant les difficultés de recrutement actuelles, je craignais le traditionnel " ces jeunes ne veulent pas bosser " qui oppose parfois nos générations. Craintes apaisées tout de suite après mon annonce par une réaction bienveillante : s’il n’est jamais agréable de voir un salarié partir, ils ont compris mon projet et nos relations sont restées les mêmes.

Les témoignages que j’ai pu récolter sont eux aussi assez rassurants. Pour une majorité des voyageurs, le problème ne s’est, pour ainsi dire, pas posé. Dès le début de leur vie active, leurs employeurs, comme leurs familles, étaient prévenus du projet ; et l’annonce de leur départ n’a donc pas été une surprise. Basile parlait souvent de leur " départ en pré-retraite " en plaisantant avec les éleveurs de la clientèle. Ces derniers, comme leurs patrons et leurs familles, les ont soutenus et encouragés. Beaucoup ont d’ailleurs choisi des emplois à durée déterminée, remplacement ou clinicat privé, sachant pertinemment que le voyage approchait. Pour ceux qui étaient en CDI, les employeurs ont su apprécier la présence de leur salarié(e) tant qu’il/elle était là. " Avoir des bras pour 2 ans c’était mieux que pas de bras du tout " soulignent Raphaël et Charlène.

Comment rentrer ?

La remarque que j’entends le plus lorsque je parle de ce projet c’est : " Après vous ne voudrez jamais rentrer et vous remettre à travailler ". N’étant pas encore partie, il m’est difficile de répondre, mais ça ne m’inquiète pas. Le tour de l’Atlantique est un projet. En revenant, nous en aurons d’autres, très différents mais tout aussi intéressants, professionnels comme personnels : Une association ? Des enfants ? Qui vivra verra ! Ceux qui viennent juste de partir semblent assez d’accord avec moi sur ce sujet.

Ceux qui sont déjà rentrés, ou dont le voyage est bien avancé, ont un peu plus de recul. Pour Basile, la déconnection avec le monde vétérinaire n’a jamais été totale. Il a continué à regarder les offres d’emploi et à préparer leur retour en France, anticipant le prochain projet de leur vie à deux, tout en profitant de chaque moment de leur " tour du monde de miel ". Le retour a été plus difficile pour Laura, car source de stress : l’accueil " avec le tapis rouge " dans leur nouvelle clinique lui a permis de vivre tout ça le plus sereinement possible. En somme, reprendre une vie plus classique s’est fait sans trop de difficultés.

Raphaël et Charlène ne rentrent pas non plus à reculons. D’autres projets les attendent et l’idée d’un retour au confort d’une maison un poil plus solide n’est pas pour leur déplaire.

Une volonté d'équilibre confirmée

Cette année " off " est bien sûr riche sur tous les plans. En plus d’apporter les souvenirs indélébiles de paysages et d’expériences humaines, elle confirme bien souvent une idée déjà présente avant de partir, la volonté d’un véritable équilibre entre vie professionnelle et confort de vie personnelle.

Basile et Laura en rentrant ont donc choisi une clinique près du littoral pour continuer à pratiquer les loisirs qu’ils aiment, une clinique où l’accueil a été très chaleureux et où les projets personnels d’autres voyages sont acceptés sans problèmes. Tant pis si ce n’est pas de la chirurgie de pointe ou de la médecine de précision. Ce qui les motive au quotidien c’est le contact avec les éleveurs et les propriétaires, le soin aux animaux mais aussi leur vie privée, sans recherche absolue de l’excellence.

Charlène retrouvera avec plaisir la clientèle mais le voyage a confirmé la décision de Raphaël de s’orienter vers le concours ISPV pour rejoindre l’ENSV et ainsi devenir un vétérinaire d’un autre genre. Ce joli projet leur aura aussi permis de réaliser l’importance des moments de pause : week-end ou vacances, dans un rythme intense et de devenir des inconditionnels de la " vanlife " !

De mon côté, le voyage n’a pas commencé alors vous dire ce qu’il va m’apporter semble présomptueux. Mais j’espère que cette année nous donnera l’occasion de ralentir pour réfléchir à ce que nous voulons pour le futur.


Quel que soit le voyage, ces aventures ont pour objectif de prendre du temps pour soi, pour découvrir le monde. Certains d’entre nous retourneront à la pratique de la médecine vétérinaire après, d’autre non. Mais ce n’est pas ce qui a motivé de tels projets. Les jeunes aiment leur métier de vétérinaire mais certains d’entre nous veulent aussi voir autre chose et surtout veulent un équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle, un équilibre où on apprécie autant les cas cliniques que les voyages.

 

Auriane Schmitt,
Vétérinaire

 

Merci à tous ceux qui ont bien voulu répondre à mes questions, y compris pendant leurs voyages.

 

 

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