Les clients en structure vétérinaire peuvent parfois donner une impression de consentement, sans réellement être d'accord avec ce qui leur est proposé. Cela peut se manifester par des réponses comme « Oui, oui, bien sûr » ou « D'accord, on verra » alors qu’ils n’ont pas l’intention de suivre vos recommandations. Ce phénomène, appelé fausse acceptation, survient souvent lorsque les clients se sentent sous pression, gênés ou qu’ils souhaitent simplement éviter un conflit. Il est essentiel pour nous, professionnels de santé animale, de détecter ces signes afin de garantir une prise en charge adéquate.
Comprendre la fausse acceptation
La fausse acceptation est un phénomène courant, surtout dans des environnements professionnels où la pression peut être forte, comme en clinique vétérinaire.
Elle se produit lorsque le propriétaire d’un animal donne l'impression d'accepter une proposition ou un conseil sans véritablement l'approuver. Cela peut résulter de différentes raisons psychologiques. Souvent, le client se sent mal à l'aise de refuser ou veut éviter un conflit, surtout lorsqu'il n'est pas entièrement convaincu ou lorsqu'il n’a pas assez d’informations pour prendre une décision éclairée.
Dans le contexte vétérinaire, cela peut survenir lors de la proposition d'un traitement, d'une intervention, ou de recommandations concernant l’alimentation ou encore les antiparasitaires.
Par exemple, un propriétaire peut accepter un conseil en alimentation proposé par l’ASV sans réellement avoir l'intention de le suivre, simplement pour se débarrasser d’une situation stressante ou parce qu’il ne veut pas se montrer en désaccord. Il peut également dire « oui » par politesse, pensant qu’il doit suivre les conseils du professionnel sans oser exprimer ses doutes.
Comprendre ce phénomène est important, car une fausse acceptation non détectée peut mener à des malentendus et compromettre la qualité des soins pour l'animal.
Les signes de fausse acceptation à repérer
Repérer une fausse acceptation n'est pas toujours évident, mais plusieurs indices peuvent vous aider à identifier lorsque le consentement d’un client n'est pas « sincère ».
Les signes verbaux sont souvent les plus évidents. Un « Oui, oui, bien sûr » ou un « D'accord, on verra » peuvent être dit sur un ton hésitant ou sans grande conviction. Ces réponses peuvent indiquer que le client n'est pas entièrement engagé dans la décision, mais préfère éviter de discuter ou de contester. Il peut aussi répondre de manière monosyllabique ou avoir des réponses vagues comme « Je vais y réfléchir » ou « On verra, merci ». Ces réponses sont souvent des moyens pour le client de se débarrasser de la situation sans confronter directement le professionnel.
Les signes non verbaux sont tout aussi importants. Si le client évite le contact visuel, semble distrait, ou reste figé, cela peut être le signe qu’il ne suit pas réellement la conversation ou qu'il n'est pas à l'aise avec la décision. Un client qui se crispe, se replie sur lui-même ou qui regarde ailleurs peut être un indicateur qu'il y a un désaccord implicite. De même, des gestes de fermeture comme le fait de croiser les bras, de reculer, voire de hocher inconsciemment de la tête peuvent indiquer une résistance à l'idée ou au traitement proposé.
Les comportements après la consultation peuvent aussi en dire long. Si le client ne respecte pas les recommandations données, comme ne pas acheter le médicament prescrit ou ne pas suivre les conseils pour les soins à domicile, cela peut être une preuve qu'il a accepté par politesse, sans réellement avoir l'intention de le faire.
Apprendre à repérer ces signes permet de réagir à temps et d’engager une nouvelle discussion pour clarifier la situation.
Astuces pour détecter une fausse acceptation
Pour mieux détecter une fausse acceptation, il faut essayer d’adopter une communication proactive et claire avec le client.
Lorsque vous présentez une recommandation, il peut être utile de reformuler, voire de faire reformuler les points essentiels par le client pour vous assurer que celui-ci a bien compris. Par exemple, vous pouvez dire : « Donc, pour bien résumer, nous recommandons de commencer ce traitement dès demain, avec une dose de X, et vous devrez revenir dans deux semaines pour une réévaluation. Cela vous semble-t-il clair ? » Ce qui va inciter le client à se réengager dans la conversation et lui donne l’occasion de poser des questions ou d’exprimer des réserves.
Mais attention, les questions fermées (réponse attendue en oui/non) peuvent souvent entraîner des réponses superficielles. Privilégiez toujours des questions ouvertes pour encourager le client à développer sa pensée. Par exemple, au lieu de demander « Est-ce que cela vous convient ? », demandez plutôt « Qu’en pensez-vous ? ». Ce type de question permet au client de s'exprimer davantage et vous aide à détecter toute hésitation ou incompréhension.
Si un client semble encore confus ou hésitant après avoir donné une réponse affirmative, n’hésitez pas à revenir sur certains points pour clarifier les choses. Une personne qui accepte par politesse peut souvent manquer de précision ou donner une réponse incertaine si elle ne comprend pas bien les implications de la décision.
Créez un environnement où le client se sent libre de poser des questions. Si vous avez l'impression que la personne accepte sans réellement comprendre, invitez-la à revenir vers vous si elle a des doutes. Par exemple : « Si vous avez besoin de plus de détails ou si vous hésitez sur quoi que ce soit, n'hésitez pas à nous contacter. »
Une communication ouverte et claire est essentielle pour garantir que les décisions prises sont réellement suivies, dans l'intérêt du bien-être de l'animal et pour maintenir une relation de confiance avec le client.
Comment désamorcer une fausse acceptation
Une fois que vous avez détecté une fausse acceptation, il est important d’agir rapidement pour clarifier la situation et éviter que le malentendu n’affecte la relation avec le client ou le traitement de l’animal.
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Revenir à l’essentiel : il est important de remettre les choses au clair en revenant aux points essentiels de la discussion. Vous pouvez reformuler vos propositions ou recommandations de manière plus concise et rassurante. Par exemple, en disant : « Il me semble que vous hésitez sur cette option. Permettez-moi de revenir sur ce traitement et sur ses avantages pour votre animal. » Cette approche permet de rétablir un dialogue ouvert.
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Inviter à exprimer des réserves : encouragez le client à exprimer ses doutes ou préoccupations. L’un des moyens les plus efficaces pour désamorcer une fausse acceptation est de créer un espace où le client se sent à l’aise pour poser des questions. Par exemple, vous pouvez dire : « Si vous avez des questions, je suis là pour y répondre » ce qui peut l’amener à verbaliser ses hésitations et vous donner l’occasion de les aborder directement.
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Proposer des alternatives ou des explications supplémentaires : si vous avez identifié qu’un client a accepté par politesse mais qu’il ne souhaite pas vraiment aller dans cette direction, proposez des alternatives. Par exemple, vous pouvez proposer plusieurs options pour réduire la pression et donner au client le temps de réfléchir à sa décision.
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Rassurer sur la flexibilité et le suivi : rassurez le client en lui faisant savoir qu’il n’est pas trop tard pour revenir sur sa décision si quelque chose ne lui convient pas. Vous pouvez lui expliquer que vous êtes là pour l’accompagner dans le suivi et qu’il peut revenir à tout moment ou appeler pour poser des questions ou modifier les choix de traitement.
En adoptant ces stratégies pour désamorcer la fausse acceptation, vous permettez au client de se sentir écouté et compris : cela renforce la confiance et garantit que la décision prise est réellement celle qu’il souhaite.
Prévenir les fausses acceptations
Au-delà de la détection et de la gestion des fausses acceptations, il est essentiel de mettre en place des pratiques qui permettent de prévenir ce phénomène dans le futur.
Lors de toute discussion avec un client, il est primordial de clarifier les attentes dès le début. Avant de proposer un traitement ou une procédure, demandez au client s’il a bien compris les implications et s’il est à l’aise avec les options proposées.
Vous pouvez dire : « Avant que nous poursuivions, est-ce que vous avez bien compris les différentes options disponibles pour [le problème de santé de l’animal] ? » Cela permet d’instaurer un dialogue ouvert et d’éviter que le client n’accepte sans réellement comprendre.
Faites en sorte que chaque interaction avec le client soit l’occasion de vérifier sa compréhension et de l’encourager à poser des questions. Adoptez une attitude proactive en demandant régulièrement : « Comment vous sentez-vous par rapport à ce que nous avons évoqué ? » ou « Avez-vous toutes les informations nécessaires pour prendre votre décision ? ». Cela crée une atmosphère de confiance où le client se sent libre de poser des questions et de poser des limites.
À la fin de chaque explication, il peut être utile de reformuler les points essentiels et de valider que le client a bien compris. Par exemple, vous pouvez dire : « Pour résumer, vous avez la possibilité de choisir entre [option 1] et [option 2]. »
Si possible, donnez au client le temps de réfléchir avant de prendre une décision. Parfois, une fausse acceptation se produit simplement parce que le client se sent pressé ou qu’il manque de temps pour prendre la bonne décision. Vous pouvez proposer : « Prenez le temps qu’il vous faut pour réfléchir, et nous pourrons en reparler lors de votre prochaine visite ou par téléphone. »
Il est essentiel que l’ensemble de l’équipe de la structure soit formé à reconnaître et à gérer les fausses acceptations. En développant une culture de communication ouverte et proactive au sein de la clinique, chaque membre de l’équipe pourra mieux déceler les signes d’une fausse acceptation et intervenir en conséquence. Des échanges réguliers entre les vétérinaires, les ASV et les clients permettent de mieux comprendre les attentes de chacun.
La fausse acceptation est un phénomène subtil mais fréquent qui peut nuire à la relation avec le client et à la qualité des soins prodigués à l’animal. En étant attentif aux signes verbaux et non verbaux, et en adoptant une communication claire et proactive, nous pouvons mieux détecter, gérer et même prévenir ces situations.
Juliette Garnodier
Vétérinaire & rédactrice de contenu